
Le tir de roquette contre un camp d’exilés iraniens en Irak est un crime ignoble et impitoyable, a affirmé Amnesty International en appelant à une enquête immédiate, une protection urgente et une assistance pour les résidents du camp.
Le Camp Liberty, au nord-est de Bagdad, a été frappé par un flot de roquettes la nuit dernière, qui a tué au moins 23 personnes, dont une femme, et en a blessé des dizaines d’autres. Une milice chiite irakienne, l’armée al-Mukhtar, a revendiqué la responsabilité de l’attaque et a prévenu qu’elle pourrait récidiver.
Le camp abrite environ 2250 exilé iraniens sans armes, pour la plupart des membres et partisans du groupe d’opposition iranien l’Organisation des Moudjahidines du Peuple d’Iran (OMPI).
« C’est un terrible acte de violence contre les résidents du Camp Liberty, qui ne peut absolument pas être ignoré des autorités irakiennes. Elles doivent garantir qu’une enquête rapide, indépendante et efficace sera menée sur cette attaque et s’assurer que les responsables seront traduits en justice, » a affirmé Said Boumedouha, directeur adjoint du Programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International.
« Leur échec total pour enquêter sur les précédentes attaques mortelles contre le camp laisse penser que ses résidents peuvent être assassinés impunément. »
Des témoins oculaires ont affirmé à Amnesty International que l’attaque a débuté vers 19h40 alors que les résidents du camp se réunissaient pour dîner. Vingt personnes ont été tuées sur le coup tandis que trois autres ont succombé à leurs blessures à l’hôpital de Bagdad.
Les résidents ont affirmé qu’environ 80 roquettes avaient été tirées sur le camp, qu’ils ont identifiées comme des roquettes Falaq Katyusha de fabrication iranienne, alors que les médias irakiens ont signalé le tir de 12 à 38 roquettes.
L’attaque a engendré des destructions étendues, touchant les générateurs électriques tandis que des centaines de résidents se sont retrouvés sans toit après la destructions de 200 habitations. Le gouvernement irakien n’a toujours pas fait de déclaration sur les événements, mais d’autres gouvernements ainsi que l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés – qui considère les habitants du Camp Liberty comme des « personnes à protéger » – ont condamné l’attaque.
« Le silence des autorités irakiennes sur le meurtre de 23 personnes est inexcusable. Ils faillissent manifestement à leur devoir devant les lois internationales de protéger tous les habitants du camp, dont la plupart sont des demandeurs d’asile. En plus d’avoir détruit des vies, l’attaque a laissé beaucoup de survivants dans des conditions désespérées », a affirmé Said Boumedouha.
« Le gouvernement doit de toute urgence faire en sorte que l’électricité et l’eau soient rétablies, et que ceux dont les habitations ont été détruites reçoivent immédiatement un abri temporaire approprié. »
Contexte
Tous les exilés du Camp Liberty avaient vécu au Camp Achraf depuis le milieu des années 80. Après l’invasion de l’Irak par les Etats-Unis en 2003, le camp et ses résidents ont été placés sous protection américaine, ce jusqu’à mi-2009 où un accord a été passé entre les autorités américaines et le gouvernement irakien.
Un mois plus tard à peine, les 28-29 juillet 2009, les forces de sécurité irakiennes ont pris le camp d’assaut ; au moins neuf résidents ont été tués et beaucoup d’autres blessés. Trente-six résidents capturés ont apparemment été torturés et battus.
En 2011, le gouvernement irakien a annoncé la fermeture du Camp Achraf après avoir transféré ses résidents au Camp Liberty au nord-est de Bagdad.
Selon un mémorandum d’accord de décembre 2011 entre les Nations Unies et le gouvernement irakien, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR) peut traiter des demandes de protection internationale par les résidents des camps. Ces résidents qui postulent pour une protection internationale sont des demandeurs d’asile en vertu du droit international.
Le gouvernement a manqué à son obligation d’enquêter sur les précédentes attaques contre les camps Achraf et Liberty, et personne n’a jamais été traduit en justice. En fait, les hauts dirigeants irakiens ont par le passé indiqué clairement que les résidents du camp n’étaient pas les bienvenus en Irak.
