Une lettre bouleversante écrite par Saïd Massouri, prisonnier politique iranien, depuis la prison de Ghezel Hessar.

 » Depuis ce matin, ils ont multiplié les pressions, les menaces, les promesses et les supplications pour tenter de me transférer. Il est évident que cette méthode (un enlèvement déguisé en transfert au sein même de la prison) ne vise pas uniquement ma personne. Elle s’inscrit dans une stratégie de contrôle, d’isolement et de mise au silence des prisonniers.

Le problème n’est donc pas le transfert en soi, mais bien la répression qu’il masque : une volonté d’intensifier les exécutions, comme ce fut le cas en 1988. Aujourd’hui encore, on craint que ce scénario ne se reproduise, avec d’autres mots, d’autres méthodes. À l’époque, on appelait cela « le comité de la mort », aujourd’hui on parle de « feu à volonté ». Mais cette vague d’exécutions et de répression massive n’est pas le signe de la force du régime — elle est au contraire l’aveu de sa faiblesse face à la vérité et à la volonté populaire. Cette fameuse consigne de « feu à volonté » n’est qu’un écran pour cacher la vulnérabilité, la décomposition, le pourrissement et l’effondrement structurel du pouvoir, que l’on tente de compenser par la vengeance contre le peuple et ses prisonniers.

Si j’ai refusé ce transfert de l’exil de Ghezelhessar vers un autre lieu d’exil, ce n’est ni par peur du déplacement, ni par l’illusion que quelques prisonniers peuvent arrêter ces actes illégaux. Je l’ai fait pour une seule et unique raison : empêcher qu’un nouveau massacre, comme celui de 1988, se déroule dans le silence et l’oubli. Pour que, cette fois, le monde observe, et que les consciences éveillées en soient témoins !

Oui, que le monde entende : un crime est en train de se commettre, et une résistance lui fait face — même si cette prise de position ne sert qu’à lancer un cri d’alerte au peuple d’Iran et au monde.

En tant que prisonnier politique sympathisant de l’Organisation des Moudjahidine du peuple d’Iran, je tiens à souligner malheur à nous si, face à ces prisons, ces exils et ces exécutions, nous reculons d’un seul pas dans notre marche vers la liberté et la dignité.

Même si notre massacre ne servait qu’à alerter – un simple écho du jour du crime – pour qu’aucune autre atrocité ne passe sous silence, ce serait déjà un honneur.

L’honneur, et le bonheur, d’avoir alerté cette patrie et ce peuple par un simple avertissement – fût-ce au prix de nos vies ! Car l’Iran et les Iraniens ont appris la persévérance et la résistance à travers leurs mythes et leurs épopées. Et quelle gloire incomparable que d’avoir puisé notre force dans ces figures légendaires, ces êtres inébranlables qui, même si les montagnes venaient à chanceler, n’ont jamais vacillé. « 

Saïd Massouri
Juillet 2025 – Prison de Ghezelhessar

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