Dans les prisons d’Iran, des étudiants emprisonnés lancent un cri de liberté à la Journée de l’étudiant

Depuis les cellules de la prison d’Evin et de Ghezel Hesar, des voix étouffées par la répression se font entendre. À l’occasion de la Journée de l’étudiant, le 16 Azar (7 décembre), des activistes étudiants emprisonnés ont fait parvenir des messages qui résonnent comme des appels à la résistance, des dénonciations de la terreur d’État et des appels à la jeunesse iranienne pour poursuivre le combat contre la dictature.

Ces lettres, écrites dans l’isolement des geôles les plus tristement célèbres du régime, témoignent d’une continuité historique : celle de la révolte étudiante, de 1953 à aujourd’hui. Elles lient le souvenir des trois étudiants tombés sous les balles de la police du Shah à Téhéran à la répression actuelle sur les campus, aux arrestations massives, aux exécutions et aux conditions inhumaines qui frappent les jeunes opposants.

Amir Hossein Moradi, détenu à Evin, évoque d’abord la douleur collective. Il rend hommage à Ehsan Faridi, étudiant menacé de pendaison, et à Ahmad Baledi, dont le suicide sous la pression des autorités a marqué les consciences. Pour lui, ces destins tragiques s’inscrivent dans une stratégie de terreur : un régime affaibli par des crises économiques, sociales et environnementales qui compense son impuissance par une escalade d’exécutions. « Le gouvernement-exécuteur est dans son moment historique le plus faible », écrit-il, « et il ne peut maintenir son pouvoir qu’en multipliant les pendaisons, en imposant un deuil permanent à la société. »

Il dénonce la complicité des trois branches du pouvoir dans cette machine à tuer, rappelant que la démocratie ne tombe pas du ciel et que la liberté ne viendra ni de l’intervention étrangère ni d’une réforme illusoire d’un régime fondé sur le massacre. « Ce sont les jeunes et les étudiants qui doivent se lever », affirme-t-il, « ce sont eux qui porteront la vision d’un Iran libre. »

Moradi rappelle le rôle central des universités dans l’insurrection de 2022, quand la colère populaire a pris corps dans les campus. Il appelle à ne pas oublier cette alliance entre les générations, à ne pas céder au silence face à la douleur des mères qui pleurent leurs enfants. « Le 16 Azar est un pacte entre les générations », écrit-il, « un engagement à rejeter les ténèbres et à faire venir le printemps. »

Depuis Ghezel Hesar, Ali Younesi, emprisonné depuis plus de deux mille jours, médite sur la signification de cette journée. Pour lui, le 16 Azar n’est pas seulement une date, mais une géographie intérieure : celle d’un hiver éternel, où le régime cherche à humilier, à briser la volonté, à faire oublier que la liberté est un droit fondamental. « Les dictatures construisent des prisons aussi vastes que le pays », écrit-il, « elles veulent que les peuples oublient qu’ils sont des êtres humains libres, non des sujets soumis à un maître. »

Il met en garde contre la honte de l’humiliation, contre l’attente passive d’un « meilleur geôlier » venu de l’étranger. La seule réponse, selon lui, est la lutte : « La lutte est la libération de l’être humain combattant, le feu ardent de l’histoire, le joyau de l’Iran moderne au milieu d’une région de despotisme. »

Younesi souligne que l’université a toujours été le cœur de cette conscience combative, de la révolte contre le Shah aux soulèvements récents. Il évoque la continuité des slogans, de « Mort ou Mosaddegh » à « Mort à l’oppresseur, qu’il soit Shah ou Guide », et rappelle que la flamme de la résistance n’a jamais été éteinte. Elle brille, dit-il, dans le corps brûlé d’Ahmad Baledi, dans la résistance d’Ehsan Faridi, dans chaque acte de défi sur les campus.

À la jeunesse iranienne, il lance un appel direct : « Regardez-vous les uns les autres. Vos cœurs sont la source de la volonté. Placez les miroirs de vos cœurs devant les autres, pour que de cette volonté s’élève une tempête de révolte. » Le 16 Azar, écrit-il, est ce message caché, encore brillant du sang des trois étudiants tombés en 1953, une lumière annonciatrice du printemps de la liberté.

Ces messages, portés depuis les murs de prison, réaffirment le rôle historique des étudiants iraniens comme avant-garde morale et politique. Ils rappellent que, malgré la terreur, la torture, les exécutions et les menaces, la résistance ne s’éteint pas. En cette Journée de l’étudiant, ce sont les voix des emprisonnés qui résonnent le plus fort, rappelant à la nation que le chemin vers la liberté continue de battre dans le cœur des jeunes Iraniens.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *