Taher Naqavi : un avocat derrière les barreaux pour avoir défendu l’État de droit en Iran

Le 27 octobre 2025, l’avocat emprisonné Taher Naqavi, accompagné de plusieurs détenus politiques de la prison d’Evine, a entamé une grève de la faim.

Grève de la faim – Le cri d’un homme pour son droit aux soins

Selon des sources proches du dossier, cette décision est intervenue après des mois de douleurs intenses, de privation de soins médicaux et d’indifférence des autorités pénitentiaires. Un codétenu se souvient :

« Il a dit qu’il ne pouvait plus supporter l’injustice. Sa grève n’était pas seulement pour lui-même, mais pour rappeler qu’en prison aussi, la loi doit encore avoir un sens. »

Avocat au barreau de Téhéran et défenseur des droits humains, Taher Naqavi avait voué sa carrière à la défense du droit — jusqu’à ce que ce même droit se retourne contre lui.

De la défense de la justice à la barre des accusés

Taher Naqavi a été arrêté le 6 février 2024, lorsque les forces de sécurité ont fait irruption dans son cabinet à Téhéran. Il représentait alors les familles de victimes des manifestations nationales de 2022.

Comme de nombreux avocats indépendants, il a été inculpé pour « propagande contre l’État » et « collusion contre la sécurité nationale », des accusations vagues et fréquemment utilisées contre les défenseurs des droits.

Privé pendant des mois d’accès à son avocat et à son dossier, il a finalement comparu devant la Cour révolutionnaire de Téhéran, sous la présidence du juge Salavati. L’audience a duré moins d’une heure : il a été condamné à six ans de prison.

Des témoins rapportent qu’après avoir entendu le verdict, Taher Naqavi a déclaré à un garde :

« Vous ne me punissez pas pour un crime, mais pour avoir accompli mon devoir. »
Le garde lui aurait répondu :
« Ici, c’est notre loi, pas la tienne. »

Le droit aux soins transformé en châtiment

D’après ses avocats, Taher Naqavi souffre de graves pathologies : hypertrophie de la prostate, hernies cervicales et lombaires, fractures de quatre vertèbres (T7, T9, T10, T11). Les médecins de la prison ont recommandé à plusieurs reprises une intervention chirurgicale urgente, mais toutes les demandes de transfert à l’hôpital ont été rejetées.

En septembre 2024, il a subi une hémorragie gastrique. Selon des témoins, un agent pénitentiaire lui a dit :

« Mets ton uniforme de prisonnier et on t’emmène à l’infirmerie. »
Lorsqu’il a refusé d’être menotté et entravé, l’agent est parti en verrouillant la porte.

Ce traitement viole ouvertement l’article 502 du Code de procédure pénale iranien, qui prévoit la suspension de la peine en cas de détérioration de l’état de santé du détenu.

Le silence du droit, la voix des prisonniers

Le 29 octobre 2025, un groupe de prisonniers politiques d’Evine a publié une déclaration alertant sur l’état critique de Taher Naqavi :

« Le refus délibéré de transférer Taher Naqavi vers un centre médical constitue un acte de torture et un traitement inhumain. Le retard volontaire des soins met sa vie en danger. L’État portera l’entière responsabilité de sa mort. »

Cette déclaration, largement relayée sur les réseaux sociaux sous les hashtags #TaherNaqavi et #PoliticalPrisonersInDanger, a attiré l’attention de plusieurs organisations de défense des droits humains. Celles-ci ont rappelé que la privation de soins médicaux est devenue en Iran un instrument de répression systématique — une forme de « torture blanche » destinée à briser les prisonniers politiques.

Au-delà d’un cas individuel

L’affaire Naqavi dépasse le sort d’un seul homme. Elle s’inscrit dans une campagne généralisée contre les avocats indépendants et les défenseurs des droits humains en Iran. Le régime cherche à anéantir l’indépendance de la profession juridique et à faire taire ceux qui défendent les opprimés.

Des organisations internationales, telles que l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) et la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH), ont à plusieurs reprises dénoncé cette persécution.

Dans sa déclaration de janvier 2025 à l’occasion de la Journée internationale de l’avocat en danger, l’OMCT écrivait :

« En Iran, les avocats ne sont pas seulement poursuivis : ils sont aussi victimes de violences physiques et psychologiques. Le cas de Taher Naqavi rappelle au monde qu’en République islamique, défendre la loi revient souvent à perdre sa liberté. »

La privation de soins : une politique délibérée

De nombreux rapports confirment que le refus de traitement médical dans les prisons iraniennes n’est pas accidentel, mais relève d’une politique d’État. Priver les prisonniers — surtout les détenus d’opinion — de soins médicaux est une stratégie de répression systématique, visant à briser leur résistance en infligeant douleur et dégradation progressive du corps et de l’esprit.

Ainsi, dans la prison d’Evine comme dans d’autres établissements du pays, les soins sont devenus une arme, et la souffrance, un moyen de domination.

Un appel à la conscience mondiale

L’état de santé de Taher Naqavi demeure critique. Les appels répétés de ses confrères, de sa famille et d’activistes civils restent sans réponse.

Ce rapport appelle le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, les barreaux internationaux et les ONG de défense des droits humains à agir de toute urgence pour sauver sa vie et garantir l’accès aux soins pour tous les prisonniers politiques en Iran.

Taher Naqavi n’est pas seulement un avocat derrière les barreaux : il est le symbole de l’effondrement de l’État de droit dans un pays où la justice elle-même est devenue un crime. Sa libération sera le véritable test de l’engagement du monde envers la dignité humaine et le droit à la justice.

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